Anouk Mahler
Anouk Mahler
Le portrait onirique de Anouk Mahler
Le portrait onirique de Anouk Mahler
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Je ne sais pas mesurer le temps qui passe. Le temps passe-
t-il vraiment
? Avec le temps, rien ne s'en va, il nous révèle
autre chose.
Je prononce ces mots en boucle pour rompre
mon silence intérieur. Je suis assis depuis un certain temps
le long d'une route où tout le monde passe, où personne
ne s'arrête. Un enfant, tel une ombre perdue, évitant les
ombres qui courent, me prend par le bras et m'embrasse
dans le noir et m'embrasse dans le cou. Où commence ce
rêve
? L'enfant doux, c'est moi. Je sens sa solitude, la mienne.
Je sens ses rêves, les miens. Se croiser à d'autres âges, même
dans un rêve, implique un pouvoir triste, un vase de secrets
sans fin. Je vois venir quelqu'un, les bras m'en tombent.
Une femme nous prend en photo puis me tend la main,
elle est belle, cheveux lisses et noirs avec raie au milieu. Je sens vos cicatrices,
me dit-elle. Qu'attendez-vous ici
? On
est encore loin de Mapuetos. J'espère qu'on ne vous a pas
dit que c'était juste à côté. La route est encore longue.
Je
cherche mon souffle, l'enfant pousse sur mes poumons et
je dis
: j'attends les fameux trois coups de marteau, terribles
coups, censés symboliser les trois coups du destin, j'attends
les coups, ceux qui vont me précipiter dans le gouffre du
désespoir sans fond.
La femme me prend à nouveau en
photo, me regarde avec compassion et dit
: vous n'êtes pas
dans le bon rêve,... je m'appelle Anouk Mahler.
Ma réaction
est immédiate
: qu'en savez-vous
? Regardez l'ombre du
gamin qui s'échappe
! Vous avez fait fuir mon enfance
!
Mes
mots criés dans le lointain au-dessus des abris excitent
la méfiance de moutons qui, par instinct grégaire, se
regroupent en troupeau serré sous une chape de plomb.
Le loup mène la danse. Le temps passe
? Ne passe-t-il
plus
? La jeune femme s'approche et me dit
: vous n'êtes
pas dans le bon rêve, le rêve aurait dû commencer dans un
salon indien où il y a une cheminée dans laquelle quelques
bûches sont en train de brûler, et de l'encens de Masala,
les fenêtres sont parées de rideaux rouges.
Le lieu est plutôt
chaleureux, quelques personnes sont assises et discutent
du temps autour de petites tables rondes, puis de tout et de
rien. Il y a un bar vintage un peu plus loin, deux personnes
y sont assises sur des tabourets hauts, les deux personnes
ne semblent pas se connaître. Dans ce rêve, je me dirige
vers une grande porte qui donne sur un corridor, je marche
longtemps dans ce couloir, je suis dans un hôtel, je passe
devant plusieurs portes, le chemin semble interminable.
Au loin, j’aperçois une forme, je m’approche et petit à petit,
c’est un éléphant. Arrivée à côté de lui, je pose ma main sur
lui.
Je garde le silence, tout ne semble qu'un jeu sans jets de
dés. Cela signifie jouer sans le hasard
,
lui dis-je. L'ombre du
gosse qui revient. Anouk Mahler s'assied sur la bordure du
jardin, on écoute le bruit des arbres, je hume le brouillard
et les embruns marins formés par le ressac des vagues que
j'entends au loin. Ici, rien n'est proche. Une porte seule sans
maison s'ouvre face à nous. Des éléphants nous observent. Qui êtes-vous
?
, me dit-elle une première fois puis d'autres
fois avec insistance. Je lui dis que j'écris des rêves, les rêves
des autres, je me lève
: enchanté, Patrick Lowie. Auriez-
vous l'heure
? J'ai vu beaucoup de gens passer mais pas le
temps.
On entre par la porte, elle caresse l'éléphant dans
le corridor. L'enfant doux s'envole. Les trois coups ne sont
que deux.
Publications & anecdotes
Ce portrait a été publié dans le livre Next (F9), 66 autres portraits oniriques
de Patrick Lowie, publié aux éditions P.A.T.
Bio
Anouk Mahler est née en décembre sur les hauteurs de la Croix-Rousse à Lyon. Après des études de lettres, elle travaillera dans sa ville natale, elle y sera brièvement libraire, placeuse dans un théâtre puis dans un cinéma ou encore vendeuse dans une boutique indienne. Elle part vivre une année à Paris pour y apprendre la communication et le développement de projets dans le milieu culturel. Elle s’occupe de la gestion de la communication pour différentes structures culturelles depuis 2015. En 2017, elle rencontre un éléphant et devient bénévole pour Corridor Éléphant (magazine en ligne dédiée à la photographie contemporaine et maison d’édition photographique) pour qui elle gère la communication et les relations presse. En dehors de la photographie, elle aime la musique (avec une préférence pour le jazz), le cinéma, l’Italie, Barcelone, les grands espaces et les sorbets au jasmin.
Précisions d’usage
Ce portrait est un portrait onirique basé sur un rêve, et donc, ce n’est qu’un portrait onirique et imaginé. Par conséquent, l’histoire qu’il raconte n’est pas une histoire vraie. Erreurs de syntaxe, d'orthographe ou coquilles... faites-nous part de vos remarques à mapuetos@mapuetos.com
Précisions d’usage
Ce portrait est un portrait onirique basé sur un rêve, et donc, ce n’est qu’un portrait onirique et imaginé. Par conséquent, l’histoire qu’il raconte n’est pas une histoire vraie. Erreurs de syntaxe, d'orthographe ou coquilles... faites-nous part de vos remarques à mapuetos@mapuetos.com