Loan Diaz

Loan Diaz

Le portrait onirique de Loan Diaz

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On ne se préoccupe jamais d'établir si l'homme qui se suicide avait de fréquentes insomnies ou s'il dormait d'un sommeil pur aux rêves consolateurs, réparateurs, évocateurs, me dis-je assis sur un banc en bois au bord de l'eau. J'écris des mots plic ploc puis je les lance dans la mer et je nourris les poissons. Bref, assis sur ce banc, l'horizon derrière moi, que je boude, horizon boudé, je lance mes mots comme on lance des piécettes dans la Fontaine de Trévi en faisant un vœu, mille vœux qui ne se réalisent jamais, je suis à la fin de mes jours, la jeunesse a pris le large, la sénescence a pris tout son sens et espère prendre le dessus sur tout ce qu'il me restait comme souvenirs. D'ailleurs, à quoi servent les souvenirs si ce n'est à se tromper une deuxième fois. Ce matin, un jeune homme m'a parlé d'une ville que je ne connaissais pas, Mapuetos. Je dis ce matin, mais je pense que c'était dans un rêve, parce qu'il n'y avait ni la mer ni les poissons ni les plic ploc plouf. Cet homme s'est approché de moi en m'expliquant qu'il venait de très loin – exactement de l'autre bout de la planète - pour m'apporter une bonne nouvelle, il m'explique avoir enfin trouvé Mapuetos. J'ai dû le regarder d'un œil étrange car il a réagit au quart de tour : vous êtes bien Patrick Lowie, n'est-ce pas ? Je lui ai répondu que je n'étais peut-être vraiment plus là et que je n'aimais pas les affronts de mer. Il commence à se demander si je n'ai pas perdu la boule, si je n'ai pas perdu le sens de l'onirisme et de sa tendre mélancolie. Seriez-vous Assembleur de Nuées beau jeune homme ? Si oui, profitez bien encore de jouer avec les mots avant qu'ils ne vous brûlent les paupières puis le coeur. Jonglez jonglez jeune homme et prenez garde à cet instant lorsqu'ils vous jouent de vilains tours, vous voyez là-bas, regardez, ces maisons qui débordent sur la nature, ces maisons sortent de nos rêves, de nos mots, de nos dessins, de nos mains. Je vous en supplie, ne me parlez plus de Mapuetos, ce n'était qu'un cauchemar avant un éventuel suicide, Mapuetos n'a été qu'un rêve consolateur pour me prétendre aventurier, je préfère nourrir les poissons avec mes mots, sachez-le. Asseyez-vous ici à mes côtés et racontez-moi votre rêve le plus énigmatique. Loan Diaz, me raconte dans une forme de réalisme-lyrique son rêve, assez rapidement comme s'il voulait s'échapper au rythme d'un temps convenu comme si le feu allait prendre la mer en otage. Il commence : ce rêve dont je n'arrive pas à me débarrasser et sur lequel je suis incapable d'écrire, je ne le fais plus depuis des années. Pourtant, il reste toujours aussi vif que cinglant dans mon esprit. Enfant, je faisais souvent ce rêve étrange : j'étais seul, dans un lieu à ciel ouvert mais entouré d'arbres (ronds, des arbres enfantins comme dessinés à la main, d'un vert pomme rassurant) qui ne laissaient paraître aucun horizon. J'étais "enfermé-dehors". Au sol, une pelouse parfaite, aucune herbe revêche. Tout semble inciter à l'apaisement et à la sérénité et pourtant il y avait là un trouble, un malaise que je ne sais toujours pas décrypter : au centre de ce lieu, se trouvait un trou noir (d'une forme cyclique), et au milieu de celui-ci une corde qui descendait du ciel et qui balançait là. À chaque fois, le même schéma : je finissais par sauter pour tenter de saisir cette corde (pourquoi ? je ne sais pas) et j'échouais. Je tombais dans ce trou, et je me réveillais.

Il me voit sourire puis rire aux éclats, je saute sur le banc oubliant cette vieillesse précoce, courant à mille à l'heure dans les dunes de sable qui dévoraient la mer, et je crie au point de m'époumoner : il a trouvé Mapuetos ! Il a trouvé Mapuetos ! Il a trouvé Mapuetos ! Loan Diaz, un instant perdu, reprend ses esprits et me dit : non, non, ça c'était mon rêve, j'ai vraiment trouvé Mapuetos, je suis venu jusqu'ici pour vous y amener, préparez vos valises, vos malles de mots et de livres, cette voiture nous attend, laissez-vous emporter, lâchez prise… Essoufflé, le soleil qui s'écrase sur l'horizon et se coupe en deux, la nuit et les étoiles qui nous enveloppent passionnément comme un moment magique et luxueux si rare. Des mots portent mes valises, c'est peut-être ici que toute mon histoire commence , me dis-je.

Je me réveille, me traîne les pieds jusqu'à la douche, l'oeil flétri, l'eau ruisselle sur cette vieille peau maudite, je m'essuie, m'habille, un selfie du matin avec moi-même sur la terrasse au soleil comme seule preuve, puis prendre la corde et tirer sur les fils de chanvre pour l'anéantir et pour en faire de nouveaux mots.


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Bio

Né en 1999 sur la Presqu'île du Bassin d'Arcachon, cahoté par le tournant du siècle et les marées. Il se consacre à la poésie depuis 2015 mais refuse le qualification de poète, lui préférant celle "d'Assembleur de Nuées". En 2018, il fonde "POÉTISTHME" une revue d'expérimentations poétiques. La flûte vertébrale sur laquelle il compose sa poésie a pour tessitures l'écriture d'un Soi indissociable de l'Autre mêlée à une note de ce qu'il nomme le "réalisme-lyrique".

Précisions d’usage 
Ce portrait est un portrait onirique basé sur un rêve, et donc, ce n’est qu’un portrait onirique et imaginé. Par conséquent, l’histoire qu’il raconte n’est pas une histoire vraie. Erreurs de syntaxe, d'orthographe ou coquilles... faites-nous part de vos remarques à mapuetos@mapuetos.com

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