Laura Schlichter

Laura Schlichter

Le portrait onirique de Laura Schlichter

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Le vent aujourd’hui, que du vent, le vent, comme un vent solide, des rues sordides, des pas, des jambes, des envolées lyriques, des coeurs qui battent, les rythmes anciens d’histoires oubliées, il fait chaud aujourd’hui, quel spectacle, la beauté des uns et des autres, les masques monstrueux, elle trébuche, je la regarde trébucher, elle n’est pas seule, quelle joie, elle tombe dans l’herbe inégale d’un parc lointain qui longe un fleuve mythique, je veux parler d’elle cette fois, ne pas parler de moi, même si je sais qu’elle est venue me chercher, pour faire quoi ?, je la regarde se relever, lentement, doucement, le sourire aux lèvres, Laura Schlichter ne me voit pas, de petits pas, elle frotte son pantalon, enlève les miettes d’herbes folles, elle parle à ses amis, les yeux pétillants, le vent aujourd’hui, que du vent, le vent, comme un sentiment solide, un ciel morbide, des oiseaux figés comme dans un tableau célèbre, des rougeurs, des incendies invisibles, destins clandestins, désirs oubliés, ombres effacées, l’idéal, une projection de soi, j’aimerais lui parler mais elle ne me voit pas, il fait chaud aujourd’hui, trop chaud, humide, et le vent ce vent qui souffle de plus en plus fort, au risque de s’envoler, de rester accrocher dans cette peinture d’un artiste fou, les yeux collés, je lui dis : mon nom est Patrick Lowie, motivateur de rêves, docteur onirique, guérisseur de feux invisibles,... elle avance, ne me voit pas je vous dis, j’ai tendu la main, elle s’est retournée, j’ai vu son tatouage, un papillon, coloré, un papillon coloré sur sa th3, un papillon tatoué qui bouge, lentement lui aussi, au ralenti, comme dans un vieux film, les ailes peintes par le soleil, un papillon jaune vif, attraction magnétique, palette de nuances du jaune citron éclatant au jaune doré, ailes bordées de franges délicates, arabesques d’or, le papillon essaye de se libérer de la peau de Laura Schlichter, il semble voler, mouvements graciles, pas de danse, il fait chaud aujourd’hui et le vent, que du vent, on aimerait tous voler, beauté d’un papillon ordinaire d’une vie éphémère, le rêve est magnifique, étonnant dans sa pure banalité, 14h14, réfléchir avant d’agir, je me touche le bout du nez avec l’index à l’ongle incarné, du lait caillé bout et fume dans un verre fumé, il fait chaud je vous dis, l’humidité, la moiteur des sentiments, l’humilité, l’extrême indélicatesse de forces dites magiques, des dieux qui font monter le moi des Hommes, tout s’échappe, la futilité, illusions agréables d’un monde maudit, couleurs d’écrans qui nous bernent, établir un ordre intérieur, se soumettre aux lois qu’on exècre, ce rêve n’est pas si banal en fin de compte, il est plus transcendant qu’il n’y paraît, se protéger du vent, le rêve est court, trop court sans doute, peu commun en réalité, et ce vent qui emporte mes idées claires et sombres, pour vider ma tête et mon corps, esprit trop absorbé, plombé, je sais pourtant que ce n’est que dans la spontanéité qu’il y a découverte et beauté, elle s’est couchée sur une belle table en chêne, coussin en soie rembourré de plumes d’oie de Hongrie, une pièce glaciale elle, je suis par terre, j’ai pris la forme d’un cafard immense, elle me voit enfin, je suis un peu loin et je vois son petit sentiment de dégoût, j’ai peur qu’elle m’écrase, me tue, mon esprit se transforme, s’éclipse, je ris et elle m’entend rire, elle voit un cafard hors normes rire aux éclats, j’aimerais l’alerter, lui dire qu’un scolopendre géant d’au moins trente centimètres sort de la table en bois, qu’avec ses cent pattes il remonte rapidement la colonne vertébrale, j’aimerais lui dire mais je ris, je vois qu’elle l’a senti, à même la peau, elle sent la tension sur son corps, immédiatement, mais elle ne voit rien, elle ne voit pas le monstre prêt à avaler le papillon jaune, elle ne voit rien de cette scène qui risque de tout anéantir, son corps est tendu, je l’ai déjà dit, et le vent, on entend même le vent dans cette pièce minuscule froide, dehors il fait chaud, trop chaud, et ce vent qui rend fou, son coeur palpite, les petites pattes du scolopendre s’agitent, et je me lance à l’attaque de la bestiole, je le mange, je mange le scolopendre géant, la tête rouge chinoise, mon habituel prédateur, c’est moi qui le mange, j’arrache tout, je me bats, pour sauver la poétesse, pour sauver le papillon jaune, pour me régaler enfin, agir, détruire l’infâme ennemi, qui nous rendait la vie impossible, qui voulait nous transformer avec le salaire de la peur, le cancer, en finir, les menaces, terminées, Laura Schlichter appelle son compagnon, crie, hurle, je suis à nouveau invisible, il dit qu’il n’y a pas de cafard, pas de scolopendre géant, pas de scolopendre de Chine à tête rouge, rien, juste le tatouage de papillon, voilà, il lui dit : il n’y a rien, juste ton tatouage de papillon, quel tatouage ? dit-elle, je n’ai jamais fait de tatouage , ses rêves, mes rêves, ces images, ces réalités oniriques, ces explications d’une vie parallèle, je me dis qu’on se souvient mais qu’ils oublient, elle dit dans ma direction, comme si elle me voyait, comme si elle m’adressait la parole, elle dit : Si vous montez sur le toit de la peur / À l'envers de la terre sous la canopée / Vous entendrez bien que ça gronde / À chercher sans cesse à nous sauver, 1 elle se promène dans les rues de Besançon, en traversant la Grande-Rue, des mots en échos, des projections d’eux, des victoires prochaines, le scepticisme est la carie de l’intelligence 2 soufflent les murs de la maison natale d’Hugo, on a eu chaud, n’est-ce pas ?, tout cela a un sens, aura un sens un jour, mieux vaut ne rien interpréter et attendre, les portes de Mapuetos ne sont pas encore ouvertes, il faudra bien y croire un jour, croire en nos rêves les plus fous et aimer, aimer !

1 Murmurations, Laura Schlichter ed. MaesltrÖm
2 Victor Hugo


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Bio

Laura Schlichter est née en 1978 en France. Diplômée d’un Master 2 en Marketing, elle bâtit sa carrière dans la communication. Après de nombreux voyages et une expatriation en Finlande, c’est à Bruxelles qu’elle s’installe en 2011. L’amour des mots en relation avec le monde habite Laura depuis toujours. Elle se lance passionnément dans la poésie par la pratique du slam en 2020 lors d’una stage dirigé par la poétesse belge Lisette Lombé (collectif L-SLAM). À partir de ce moment, elle fait de son compte Instagram @Laura_dans_lair un laboratoire poétique où l’exploration des formes et des thèmes lui donne l’élan pour une écriture quotidienne. Elle initie un mouvement de collage poétique en 2022 qu’elle nomme #lesmursmemurmurent. Elle rejoint le collectif bruxellois de Slam, Slameke avec lequel elle anime des scènes ouvertes et des ateliers d'écriture.Elle participe à la 4e édition du Serveur Vocal Poétique dont l’anthologie est parue à Le Chouette Imprévue. Murmurations, son premier recueil paraît en avril 2023 chez maelstrÖm réÉvolution. Elle participe en juin 2023 au recueil collectif "56 descentes dans la maelström" paru aux mêmes éditions.

Précisions d’usage 
Ce portrait est un portrait onirique basé sur un rêve, et donc, ce n’est qu’un portrait onirique et imaginé. Par conséquent, l’histoire qu’il raconte n’est pas une histoire vraie. Erreurs de syntaxe, d'orthographe ou coquilles... faites-nous part de vos remarques à mapuetos@mapuetos.com

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