Théo Rasquin

Théo Rasquin

Le portrait onirique de Théo Rasquin

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Michel Random écrivait : « Spectacle unique. Moi-qui-veille prend le bras de Moi-qui-dors, comme on fait à un convalescent et tous deux (ou tout un en deux) font au pas le tour de la chambre. » (Le grand Jeu, Denoël 1970). La nuit fait peur, mais le jour se lève toujours. Je m'observe dans l'eau d'une rivière et je me dis : espérons que l'inconscient ne se referme pas. Un deuxième visage apparaît, je jette un cailloux dans l'eau, tout disparaît, je me retourne, un jeune homme était entrain de m'observer, comme si c'était un jeu, il fixait ce que je regardais et nous nous sommes vus tels des images d'un monde qui n'existe pas encore. Je ne suis pas nostalgique, mes seuls souvenirs proviennent du futur. Deux magiciens ? Deux visages : Moi-qui-rêve et Moi-qui-vis. Vous m'avez surpris , lui dis-je, je pensais être seul. Je pensais au rêve de cette nuit : je cherche, je cherche mais je n'y vois aucune explication. J'ai vu ma mère ramener à la maison une autruche, puis elle l'a égorgée et dépecée. Je lui ai dit : « tu sais, les yeux d'une autruche valent une fortune, donne-les moi ». Mais elle a refusé. Mille excuses, je me rends compte que je parle de mes songes à un inconnu. Qui êtes-vous, jeune homme ?

Comme par superstition, il lance, à son tour, une pierre dans l'eau. Et là, alors que je m'étais éloigné, nos deux visages se recomposent sur la surface de l'eau. Il me dit : vous pensez que votre temps est révolu, mais il ne s'est encore rien passé. Vous ne vous êtes pas trompé, les honneurs sont pour demain, je m'appelle Théo, Théo Rasquin. Je fais du théâtre, j'exorcise mes démons, je libère mes angoisses et mes révoltes. Je rêve. J'apparais dans les rêves d'autrui. Je lui dis : qu'espériez-vous ? nous rêvons tous d'un monde meilleur mais nous devrions apprendre à rêver mieux. Avez-vous déjà entendu parler de Mapuetos ? Il me fait un signe avec la tête, un signe négatif mais avec un sourire qui voulait dire autre chose qu'une moquerie. Comme si en une seconde il savait de quoi je parlais, il ajoute : n'en parlons pas maintenant, il y a d'autres choses à régler avant d'aller à Mapuetos. Vous êtes Patrick Lowie, n'est-ce pas ? Toujours convalescent ? Ce rêve devrait nous/vous réveiller, vous ne pensez pas ? Après, je ne pourrai plus rien faire. C'est ainsi. Je vous propose un petit jeu onirique : rejoignez-moi dans un autre rêve. Imaginez que je suis dans mon lit, que j'ai dix ans. La maison est étrangement vide. L'enfant a peur. Il entend un bruit. C'est la porte de la cage d'escalier qui s'ouvre, il sent, je sens une puissance noire, froide. Mes intestins se contorsionnent, j'ai mal, des crampes,… j'entends des pas monter l'escalier, je me cache sous les couvertures, je suis tétanisé. J'entends tout, le souffle, les pas, les grincements, il se rapproche, lentement mais il se rapproche, ces grincements ce sont mes peurs du monde extérieur, je le sais, je l'ai toujours compris, je me sens seul, j'essaye de dormir mais je n'y arrive pas.

Il s'interrompt, je lui dis : vous essayez de dormir mais vous dormez déjà, c'est un rêve. Il sourit, je vois son visage s'émerveiller, s'éclaircir, il devient très beau, de cette beauté des êtres qui ont l'inconscient ouvert, il aimerait dire toute la vérité, me la dire, mais quelque chose le bloque, je le laisse apprendre à mettre tout en place dans son esprit, je poursuis : c'est un jeu, n'est-ce pas ? Je ne joue pas souvent mais je gagne toujours. Je pourrais jouer tout le temps pour gagner toujours, mais c'est lassant. Les yeux du jeune homme transpercent la puissance d'un corps brut comme si nous étions à l'approche de jours nouveaux.

Il poursuit son histoire : je me dis, Théo ne craint rien. Mais je pense que si je ne dors pas, cette chose me tuera, j'entends le souffle entrer dans ma chambre, je fais semblant de dormir, parvenant à peine à contenir mes tremblements. J'entends une voix qui me dit : « Est-ce qu’il dort ? Est-ce qu’il fait semblant ? ». Ma jambe bondit, donnant expression d’une terreur en un saut d’acrobate. Le monstre, mes peurs, mes angoisses, Ils l’ont tous vu, ce saut. La chose m’attrape brutalement et me lance derrière mon lit. Je tombe dans un immense néant, je hurle mes larmes. Je me réveille….

Je ne dis rien, je retourne vers la rivière à la recherche de mon image, un reflet, je vérifie, il me suit, va-t-il me pousser dans l'eau ? Je lui dis : je ne suis pas Narcisse, je ne mérite pas le nom d'une fleur, ne me poussez pas. Je connais votre rêve Théo, c'est moi qui suis venu dans votre maison si vide, c'est moi qui, essoufflé, suis monté jusque dans votre chambre, toutes ces marches, ces centaines d'étages, c'était épuisant, je voulais abandonner, mon but était de vous réveiller, de vous apporter la bonne nouvelle, de vous expliquer que vous ne deviez vous angoisser de rien, que tout irait comme un sentier sans fin, la victoire au bout du chemin, je suis arrivé dans votre chambre, vous n'aviez pas dix ans mais vingt, nous avons fait au pas le tour de votre chambre, je n'étais pas un monstre, je n'étais pas une chose, je n'étais qu'un reflet de votre âme, je n'étais qu'une histoire, un ami, votre histoire la plus secrète. Vous n'êtes pas tombé, vous n'avez pas hurlé, vous n'aviez pas dix ans mais vingt. Ne plongez pas dans la rivière, je risque de vous suivre et je ne me souviens plus des mouvements pour nager.

Il plonge dans l'eau de la rivière
Que pouvais-je faire d'autre que de le suivre ?
Rien.
Je l'ai suivi.


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Bio

Théo Rasquin est un jeune comédien belge né en 1999. Après quatre années passées au conservatoire Balthazar-Florence de Namur, un bref passage à l’IAD et à l’ESACT (conservatoire de Liège), il décide de prendre sa destinée en main, déçu et détruit par les écoles artistiques qui cherchent à le formater et brident sa spontanéité. Il a besoin de liberté pour pouvoir exprimer toutes les palettes de son Art. Il remporte plusieurs concours d’éloquence et d’interprétation. Il joue dans la série française « La Forêt » aux côtés de Suzanne Clément et Samuel Labarth et multiplie les rôles dans des cours métrages. Il tâte du théâtre et bien que ses désirs le mènent naturellement vers le jeu d’acteur, il se lance dans l’écriture. Il écrit des chansons et poursuit des cours de chant tout en s’adonnant à une autre passion: la prestidigitation.

Précisions d’usage 
Ce portrait est un portrait onirique basé sur un rêve, et donc, ce n’est qu’un portrait onirique et imaginé. Par conséquent, l’histoire qu’il raconte n’est pas une histoire vraie. Erreurs de syntaxe, d'orthographe ou coquilles... faites-nous part de vos remarques à mapuetos@mapuetos.com

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